C’est dans le cadre du Salon International de l’Auto de Toronto, présenté du 15 au 24 février prochain que seront honorés une dizaine de journalistes sportifs qui, par la suite feront leur entrée au Canadian Motorsport Hall Of Fame.
Parmi eux, le journaliste du Journal de Montréal pendant plus de 30 ans et à la retraire depuis près de 10 ans, Pierre Lecours sera du nombre et le premier journaliste québécois.
Il s’agit d’une nouvelle catégorie (journalistes de sports motorisés) pour les nominés ayant marqué, à leur façon, l’histoire du sport automobile au Canada. D’y retrouver un journaliste de chez-nous est un honneur et une consécration grandiose pour Pierre, mais aussi pour sa famille, ses proches et toute la communauté du sport motorisé québécois.
Pierre a été « Au Cœur » de l’ascension de Gilles Villeneuve en lui présentant Gaston Parent en 1976. Ce dernier avait « avancé » l’argent pour que Gilles participe au GP3R la même année et tout le monde connaît la suite dont son ascension vers la Formule Un et surtout ses résultats jusqu’au samedi maudit, le 8 mai 1982.
Il a également rédigé un livre Gilles, Jacques, les Villeneuve et moi relatant justement ses relations avec les Villeneuve, Gilles et les deux Jacques. À noter également qu’il a été le dernier journaliste à être invité sur le podium d’une course de Formule Un, lors d’une certaine course au mois d’octobre…1978. D’ailleurs sur certaines vidéos de l’époque on l’aperçoit tenant le manteau de Gilles à l’arrivée de la voiture après le tour d’honneur et « tasser » tout le monde, car tout le monde semblait vouloir monter à bord de la voiture avec Gilles !
Pierre y rejoindra quelques autres Québécois honorés au fil des ans dont Gilles & Jacques Villeneuve, Jean-Paul Cabana, Richard Spénard, Alaln Labrosse, Michel Mercier, Jacques Villeneuve et Antoine Lestage.
Je peux parler en connaissance de cause et, de très nombreuses personnes peuvent en témoigner, Pierre n’était pas un facile. On l’aimait ou on le détestait. Et, ceux qui le détestaient, le plus souvent, étaient ceux que lui aimait le plus !
J’en ai justement discuté récemment avec Monique, l’épouse de Denis Giroux décédé il y a quelques mois. Celui-ci avait été sérieusement blessé dans un accident à Stafford au Connecticut (1974) et Pierre était très proche de lui. Il s’est rendu à son chevet, l’a suivi durant sa réhabilitation, les deux se sont même « chamaillé » à plusieurs reprises, car Pierre avait décidé que Denis se réhabiliterait. C’était tenté de battre le destin, car les séquelles étaient trop sévères et Pierre a dû abdiquer, mais après de longs mois de combat auprès de celui qu’il aimait comme un frère. Pierre s’est ensuite découvert de nouvelles affinités et amitiés avec la famille Villeneuve qui faisait, à l’époque la pluie et le beau temps en compétition de motoneige sur ovale.
Aussi agile qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine, Pierre ne savait pas mettre des gants blancs et disait pas mal toujours la première chose qui lui passait par la tête. Il voulait que les gens qu’il aimait performent à leur plein potentiel et ce, sans demi-mesure. Personnellement, je lui dois ma propre carrière dans le monde du sport motorisé. Je pourrais en écrire longtemps à ce propos, mais ce sera pour une autre fois.
Pierre était un journaliste « guerrier » et pour lui ce qui comptait le plus, c’était d’avoir LA nouvelle, LA primeur et il en a eu bons nombres en carrière. Il était exclusivement affecté, par le Journal, à la couverture des sports motorisés, ce qui a permis à bon nombre de pilotes, d’organisations et d’évènements de profiter d’une visibilité exceptionnelle.
Beaucoup le critiquait, pour son caractère surtout, mais aujourd’hui, beaucoup s’en ennuient pour ce qu’il apportait. Sans compter que les médias sociaux « polluent » littéralement notre environnement et le VRAI journalisme professionnel est en voie de disparition.
Il me revient une discussion avec Réjean Tremblay en prenant le petit déjeuner au GP de Monaco en 1998 qui m’avait dit « Ton frère, je ne le comprends pas, il voyage à travers le monde pour suivre les Grand-Prix et jamais ne prend le temps de visiter un tant soit peu ou encore nous ne le voyons jamais dans les banquets ou cérémonies protocolaires, pourquoi n’en profite-t-il pas ? Dès que le GP, et ses textes terminés, il file à l’aéroport pour rentrer chez lui. Il est comme ça Réjean…est la seule réponse qui m’est alors venue à l’esprit. Les banquets, party de courses et autres, il détestait vraiment. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il ne « courait » pas les cérémonies québécoises de remises de toutes sortes à la fin de chaque saison.
Voilà aussi pourquoi sa réaction très émotive à l’annonce de son entrée au Temple de la Renommé du Sport Automobile Canadien m’a scié les jambes…et m’a pris quelques semaines avant de rédiger cette publication.
IL SERA ABSENT….
Plusieurs le savent, Pierre a été frappé par la maladie, un très violent AVC le 1er février 2013, il y a maintenant 6 ans. Depuis cette triste journée tout le côté droit de son corps est demeuré paralysé et le plus percutant des conséquences, il a perdu l’usage de la parole. Tout a été tenté, cours de diction, orthophonie et tout le reste, mais il ne reste plus que quelques mots qu’il réussit à prononcer, vivant maintenant prisonnier de son propre corps.
À l’annonce de la nouvelle pour son introduction, il y a quelques semaines, j’appréhendais de lui annoncer la nouvelle, mais il a eu une réaction très émotive et ça, je ne m’y attendais pas du tout.
Il faut savoir que Pierre, dans les dernières années, s’est désintéressé du sport motorisé n’ayant plus de contact avec le milieu et, à part quelques rares exceptions, le milieu a aussi perdu contact avec lui. Je l’ai vu pleurer plus souvent qu’à mon tour dans les dernières années. Pour sa condition, pour ce qui lui arrivait et sur ce qu’il lui reste de « l’avenir » …mais là, c’était des larmes de bonheur et d’émotions.
La plus âgée de ses filles, Mélanie est maintenant résidente de la région de Toronto et c’est elle qui a pris en charge le dossier. Elle projetait de l’amener là-bas pour l’annonce du 13 février prochain, mais de nouvelles complications avec sa santé sont venues changer les plans dans les dernières semaines. Il est de retour chez-lui après un séjour forcé à l’hôpital et reprend lentement des forces et sa routine.
Moi je vais faire comme à mes débuts, je vais lui montrer le texte, mais cette fois il aura été publié…il ne pourra donc pas m’enguirlander (lire coup de pieds au cul) pour que ce soit à SON goût à lui… hihi !
Pour plus d’infos, l’annonce de sa nomination et son introduction à venir : https://cmhf.ca/2019/01/31/autoshow-hall-of-fame-to-honour-10-motorsports-journalists/