Marco McCarthy: un sourire contagieux

Crédit photo : Pierre Chamberland

À l’image de la saison dernière, les courses ont tardé à se mettre en branle parce que Dame-Nature ne voulait absolument rien savoir. D’aussi loin que je me souvienne, je ne me rappelle pas avoir dû attendre tout près d’un mois avant d’avoir mes premières photos au Québec. J’ai dû me rendre au Cornwall Motor Speedway pour les deux premiers rendez-vous de la saison 2025 parce que je n’en pouvais plus de prolonger mon calvaire. C’est évident que plusieurs pilotes québécois ont décidé de faire le voyage pour y aller de leurs premiers tours de piste de la saison. Comme je les vois régulièrement sur les pistes du Québec, j’essaie de diriger mon kodak vers de nouveaux visages, de nouvelles voitures.

Un de ceux que j’ai appris à connaître au fil du temps est le pilote du sportsman #37, Marco McCarthy. Il a connu quelques malchances cette saison qui l’ont passablement ralenti, lui et son équipe, dans l’obtention de bons résultats. On ne peut malheureusement rien faire quand la mécanique nous lâche. On doit se battre avec une voiture capricieuse et user de stratégie afin de dépasser les autres compétiteurs sur la piste. Ça ne se passe pas toujours comme prévu et si notre adversaire a décidé de nous envoyer dans le décor, les espoirs viennent de partir en fumée. Il a dû faire une pause pour évaluer la gravité de la situation, pour voir s’il pouvait continuer sa saison. Sa patience a été mise à rude épreuve mais, grâce au soutien de son équipe et de deux de ses principaux commanditaires, Marco ne pouvait demander mieux pour retourner derrière son volant: «C’est super apprécié. J’adore mon équipe et je suis très reconnaissant d’eux et de mes commanditaires». J’aurais perdu le sourire assez facilement et ma face de gars pas motivé aurait été perceptible à des kilomètres à la ronde si j’avais été dans sa situation.

        

Parlant de sourire! Je ne sais pas s’il croit aux coïncidences, mais tout semble indiquer pour Marco et son équipe que le sourire est revenu dans les parages parce que le 13 juillet dernier, c’était la soirée des autographes à Cornwall. Le fait de signer des autographes sur une de ses photos le montrant en action et de les remettre aux plus jeunes est un sentiment indescriptible: «Ça me rend heureux car je me souviens d’avoir été un de ces enfants-là. Et de redonner la passion des courses aux futures générations, c’est parfait pour moi». Je peux en déduire qu’il a tassé, du revers de la main, tout ce qui lui est arrivé depuis le début de la saison et ce, dans le but de vivre le moment présent. Cela a certainement dû lui demander un effort gigantesque, mais d’après les photos sur les réseaux sociaux, cet effort en valait amplement la peine.  La course automobile est un mode de vie et d’en faire profiter les tout-petits est juste un beau geste de sa part. Tu as toute mon admiration!       

         Le cheminement pour se rendre au sommet, peu importe la catégorie choisie, est parsemé d’embûches. Cependant, un point en commun demeure: l’univers du karting est un incontournable pour pouvoir développer ses capacités à piloter. Le parcours de Marco n’a pas fait exception à la règle puisqu’il a été mis dans le bain très tôt dans sa carrière: «J’ai reçu mon premier gokart à l’âge de 5 ans comme cadeau de Noël et je course depuis ce temps-là. J’ai fait du kart jusqu’à 13 ans. Ensuite, du Slingshot et du Sportsman de 15 ans à 19 ans. J’ai fait du karting sur terre battue à plusieurs tracks comme Cornwall, Granby, Canam, Brockville». Le succès n’a peut-être pas suivi aussi vite que Marco et son équipe le croyaient, mais la compétition est très féroce chez les Sportsman. Il suffit de faire des tours et encore des tours et la chance va finir par tourner. Faut pas lâcher!

        

L’univers de la course automobile est truffé de possibilités pour permettre aux pilotes d’aiguiser leurs réflexes. Comme je le mentionnais, le karting semble être une excellente école pour apprendre les rudiments du métier. Jusqu’à quel point elle permet aux pilotes de s’améliorer au point de rendre l’adaptation de la prochaine catégorie moins difficile? Pour le pilote du bolide #37, non seulement il a une connaissance accrue du fonctionnement d’une voiture de course, mais il a pu bénéficier sur l’appui précieux de gens très connus dans le milieu comme la famille Ladouceur et Joël Doiron :«Ça m’a aidé à apprendre la mécanique et recevoir des conseils m’ont aidé à travers de mes années de courses. Tout doit être tellement plus léger dans le garage en sachant que monsieur Ladouceur peut mettre sa main sur ton épaule en disant: ce n’est pas grave garçon, des erreurs ça peut arriver. Toute la sagesse et l’expérience que Marco peut tirer d’une telle présence dépasse l’entendement. Je ne veux pas mettre tous les jeunes qui poussent dans le même panier parce que les personnalités sont différentes les unes des autres, mais Marco a probablement donné quelques sueurs froides à son équipe. Mais comme il me l’a si bien dit, les bons conseils qui lui ont été prodigués, lui ont permis de bien voyager sur la piste: «Ça m’a aidé avec ma conduite sur la piste, avec les ajustements pour la voiture, ainsi que de me donner des bons trucs pour bien naviguer sur la piste».

         Pour amorcer une carrière dans le monde de la course automobile, la catégorie des Slingshots semble être le tremplin parfait. De faire le saut en Sportsman constitue une marche énorme, certes, mais les deux ans de course en Novice Sportsman lui ont été d’une aide plus que bénéfique: «S’ajuster à la voiture et la vitesse de la voiture Sportsman. J’ai fait 2 années en Novice Sportsman et ça m’a bien servi». Je m’interrogeais sur la pertinence ou l’utilité de cette dernière parce que le «carcount» n’est pas toujours à la hauteur. Je comprends que ceux et celles qui n’ont jamais courser à Cornwall ou ailleurs ont la chance de voir ce que ça prend réellement pour monter dans la grosse classe. N’empêche que c’est au pilote d’en profiter et de montrer toute l’étendue de son talent: «C’est une très bonne façon pour apprendre puisque nous faisons des courses face à des pilotes comme nous et, avec moins de pilotes, ça nous donne plus d’espace sur la piste pour apprendre afin de monter en sportsman régulier». J’imagine qu’il a connu des soirées plus ordinaires que d’autres mais, visiblement, il en a fait suffisamment pour être dans la grande ligue.

         On apprend toujours à marcher avant de courir. Je veux dire par là qu’il ne faut pas sauter d’étapes dans notre cheminement pour arriver au bout. La classe Novice Sportsman apporte très certainement son lot d’expériences avec des tours de piste en banque, mais quand vient le temps de faire le saut en Sportsman, c’est littéralement une autre «game»: «Une plus grosse et meilleure compétition, des pilotes plus féroces et avec plus d’expérience. Quelques grandes expériences jusqu’à date comme mes premiers tops 10, mon premier gros accident, etc». Je ne dirais pas que les règles de la partie changent, mais disons qu’en ayant un nombre beaucoup plus élevé de pilotes sur la piste, la marge de manœuvre est beaucoup plus restreinte et les fautes sont quasi impardonnables.

          La course automobile est un sport dangereux et personne n’est à l’abri d’une catastrophe qui pourrait mettre fin à une saison, voire même à une carrière. Je ne suis pas sûr à 100% que les pilotes le réalisent pleinement. En fait, je pense que oui, mais pas tant que le gros accident n’est pas arrivé, ils ne le réalisent pas pour vrai. Je dis gros accident, mais il suffit seulement d’une bonne frousse pour faire prendre conscience que le sport qu’ils pratiquent comporte des risques. Je croyais que Marco allait devenir un peu plus craintif suite à un accident sérieux l’an dernier, mais visiblement la peur n’est pas apparue dans son cas pour retarder son retour en piste: «Pas dans mon cas! J’ai eu un accident sévère l’an dernier dans ma qualification et je suis revenu en piste pour la finale». Il m’a montré les images de son accident et les dommages sur la voiture étaient très lourds. Il n’avait peut-être plus la voiture pour donner du fil à retordre aux autres, mais il a ramassé de précieux points pour le championnat.

         L’argent est le nerf de la guerre en course automobile pour pouvoir se tailler une place parmi les trois premiers. Quand une petite équipe obtient un excellent résultat, comme un premier top 10, est non seulement bon pour le moral, mais les troupes se sentent plus motivées que jamais à vouloir aller de l’avant: «Beaucoup de fierté pour une équipe à petit budget. C’est un bon feeling et ça te pousse à vouloir continuer et t’améliorer». Il faut souvent laisser au temps le temps de faire son œuvre. Je ne sais pas si les bonnes performances qui s’accumulent pèsent plus dans la balance que le fait de montrer les dents de courses en courses, mais j’aurais tendance à dire la 2e parce que les autres compétiteurs vont devoir t’avoir à l’œil à chaque fin de semaine. Le reste va suivre!

         Ce n’est plus un secret de polichinelle pour personne que les courses automobiles sont une histoire de famille. Il faut savoir s’entourer des bonnes personnes et le temps passé avec son entourage est ce qu’il y a de plus précieux au monde. C’est en grande partie la raison numéro un pourquoi il aime tant les courses: «Le thrill et le temps que je passe avec mon père, mon oncle et mes amis. Ils m’aident énormément pour toute la maintenance de l’auto et me donnent des conseils. Mon père était crew chief pour le 88 de Simon Marcoux lorsqu’il coursait en Modifié dans les années 2000». Ça va au-delà de la simple relation père-fils. Quand mon père avait une soirée chargée prévue dans le garage, j’allais passer mon temps à le regarder réparer son auto. Je n’avais pas les aptitudes manuelles pour l’aider, mais j’aurais tellement aimé. Imaginez ce que Marco est en train de bâtir avec son père et son oncle. Les trois, sous le capot, en train de se passer les outils pour changer le carburateur. Ils doivent se passer les outils à une vitesse alarmante tellement ils se connaissent par cœur.

        

J’aurais tendance à penser que d’être aussi près l’un de l’autre aussi souvent pourrait altérer leur vie de tous les jours. C’est-à-dire que la vie aux courses prendrait le dessus sur leur vie personnelle. Pour Marco, c’est seulement une occasion de se rapprocher encore plus de son père: «Non pas vraiment, ça nous permet seulement de vivre une passion les 2 ensemble. Comme lorsqu’il m’entraînait au hockey avant que j’arrive dans le junior». Au travers de leur péripétie, ils bâtissent quelque chose de très solide et personne ne semble pouvoir les ébranler.

         Ça adonne peut-être comme ça, mais je prends souvent des photos où les pilotes ont les yeux fermés deux secondes pour se concentrer. J’adore ce type de photo parce que je suis témoin, en quelque sorte, de la vulnérabilité des pilotes. «Juste de rester calme et de ne pas précipiter mes manœuvres puisque la course n’est pas gagnée lors du premier tour» me mentionnait Marco sur les derniers instants qui l’habitent avant le départ de la course. Le mini moment où ils sont enfin seuls, dans leur bulle, fait partie intégrante de la journée du pilote et a son importance. Je ne vois pas d’autres occasions de connecter avec soi-même et de faire le vide dans le but d’être à 100% concentré sur ce qu’il y a à faire.

         Lui et Tristan Ladouceur sont originaires tous les deux de Glengarry Nord. Comme la passion de la course automobile les occupe tous les deux, il était intéressant de savoir s’il y avait une saine compétition amicale: «Pas une compétition, mais on s’aide les deux. J’ai fait mon école élémentaire et secondaire avec lui. Nous sommes des amis de longue date». Je comprends que la relation que Marco a avec son père et son oncle est unique et spéciale, mais celle avec son meilleur ami n’est pas à tasser du revers de la main. Pour connaître du succès en course automobile, il est primordial d’éloigner les mauvais esprits de son entourage. Qu’est-ce que la course automobile lui a apporté tant au niveau personnel que dans la vie de tous les jours?: «Plusieurs nouvelles connections, de bons amis et de bonnes leçons de vie».   

         J’espace mes visites à Cornwall parce que la route que j’ai à faire, celle du retour surtout, est souvent pénible et mon réveil du lundi matin l’est tout autant. Cela dit, j’adore toujours aller faire une petite tournée chez nos voisins Ontarien pour voir d’autres pilotes «performer» sur la piste. Et bien entendu que Marco McCarthy en fait partie. Tout le monde mérite que l’on s’arrête pour les écouter et nous raconter leurs histoires.

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