S’il y a un point en commun entre la série « Courses Vintage Québec » et 360Nitro.tv, c’est bien la passion. J’ai eu le plaisir de discuter dernièrement avec le grand manitou de la discipline, Paul Giroux. Ce fut une conversation plus qu’intéressante qui, à quelques reprises, a dévié du sujet principal de notre entretien.
Quelques infos sur la série
En piste depuis 2011, ce regroupement de passionnés de voitures anciennes compte actuellement 51 membres. Les autos de 1982 et moins sont admises, en autant que celles-ci soient à carburateur. À mon grand regret, ma Chevrolet Cavalier Z24 avec son rutilant moteur six cylindres 2.8 litres n’est pas admissible. Bon, j’avoue que j’ai beaucoup de travaux à effectuer sur ma Cavalier et je ne suis pas convaincu. Elle a plus le profile pour se retrouver dans une course de démolition. Cependant, il y a quand même une exception : si votre modèle de voiture existait en 1982 mais que celle-ci est plus récente (par exemple du millésime 1984) et qu’elle n’est pas à injection, elle pourrait être acceptée. Certains modèles de Mustang peuvent dévier de cette règle.
La série est divisée en deux classes, soit les deux litres et tout ce qui est supérieur à deux litres. Par exemple, les MG se retrouvent dans la catégorie des deux litres et moins, tandis que les Mustang et Camaro sont dans l’autre division.
La discipline est sanctionnée par « Auto Sports Québec » (ASQ). Le championnat est sous forme de points de présence pour encourager la participation. Le but ici n’est pas la victoire à tout prix, mais plutôt d’avoir terminé sa course avec le sentiment d’avoir eu du devoir accompli. Cette année, les participants avaient la possibilité d’effectuer quatre sorties, soit les trois classiques de Tremblant ainsi que le Grand Prix de Trois-Rivières. Les membres proviennent des quatre coins du Québec.
Comment en faire partie ?
Pour se joindre à la série, il faut obtenir une licence de compétition. D’ailleurs, du support en ce sens est fourni, tant pour l’obtention du permis que pour la préparation d’un véhicule réglementaire. Un cours de pilotage de trois jours a lieu chaque printemps permettant d’obtenir le sceau de l’ASQ. Au début de la série, il n’y avait pas d’école. Le cheminement peut être long pour devenir un gladiateur du bitume, d’où l’importance d’être bien entouré pour prendre du galon. La formation se donne à Tremblant, ce qui est parfait, car c’est à cet endroit que la majorité des activités ont lieu.
Les gens ont tendance à penser que conduire des bolides « vintage » est facile. Détrompez-vous : il y a énormément de changements de vitesse dans un tour, dans certains cas, les vitesses atteintes sont quand même impressionnantes. Vous ne serez jamais seul, car l’entraide est très importante entre les membres, surtout lors des fins de semaine de courses. Il y règne une franche camaraderie, car c’est avant tout le but.
Un bel échantillon d’histoire
Les bagnoles que l’on retrouve dans cette série sont carrément un pan d’histoire du sport automobile. Pas juste au niveau nord-américain ou international, mais aussi au niveau québécois. Bien entendu, il y a les fameuses Mustang. Une des voitures qui a attiré mon attention est celle du journaliste Éric Lefrançois, chroniqueur automobile à « La Presse ». Ce dernier est derrière le volant d’une rutilante Lancia Scorpion 1976 qui faisait tourner les têtes à Trois-Rivières.
Voici une courte liste des voitures qui ont retenu mon attention, avec entre parenthèses, le nom de leur propriétaire : Fiat 124 Spider 1972 (Chris Rupnik), Datsun 510 1968 (Chris Hobé), Mazda RX3 1972 (Russ Bond), VW Beetle 1960 (Jason Di Cesar), MGB GT 1972 (Daniel Di Cesar), MGA 1960 (David Di Cesar), Vega 1975 (Éric Durand), Porsche 911 1973 (Bertrand Dupuis), et Opel GT 1971 (Tony Reda).
Je dois vous avouer que j’ai un léger parti pris parmi la liste énumérée ci-dessus. Mon coup de cœur est la Porsche 911 de 1973, propriété de Bertrand Dupuis. Comme disait mon père : « Solide » (je ne vous dis pas dans quel contexte il utilisait ce terme). Une petite particularité concernant la Mazda RX3, qui est à moteur rotatif : on m’a signalé que, pour être admissible aux normes anti-bruit à Tremblant, celle-ci est équipée d’un silencieux destiné à l’origine à un F-150.
Finalement, si vous vous demandez s’il y a un lien entre les propriétaires mentionnés qui ont le même nom de famille, sachez que les trois « Di Cesar » sont la combinaison de deux frères qui compétitionnent avec leur oncle Daniel.
Chaque auto a son histoire
Il serait intéressant de discuter plus en profondeur avec quelques participants de la série. Comme disait Paul Giroux durant l’entrevue, chaque voiture a son histoire.
La voiture de Giroux a déjà couru dans les années 70, entre autres sur le circuit de Trois-Rivières. À cette époque, elle était pilotée par son père, Claude. Ce dernier n’a pas laissé sa marque seulement comme pilote, mais aussi comme directeur général de ACIND, « Automobile club de l’ile Notre-Dame » organisateur du grand prix du Canada, dans lequel il a été impliqué jusqu’en 2003.
La MGB de 1972 de Paul était entreposée dans une grange à Mirabel depuis 23 ans. Le père de Paul étant malade, Paul voulait lui faire honneur en restaurant la voiture avant son départ. Il aura fallu un an de travaux pour remettre en état de marche le bolide, qui est maintenant très précieux aux yeux de son propriétaire.
Pour ce qui est du processus de restauration de la voiture de 52 ans, il semble que les pièces soient quand même assez faciles à trouver. Ce qui est le plus onéreux pour remettre l’auto en état de marche est le moteur, qui fonctionne à haute compression et dont le coût peut aller jusqu’à 20 000 $.
Habituellement, les participants prennent des autos qui ne sont pas en état de rouler pour en faire des voitures de course sans en faire des voitures d’exposition. Même si les frais d’inscription tournent autour de 700 $ par course, il reste que c’est bâtir la bagnole qui représente la plus grosse dépense. C’est une série quand même technique, car le « tuning » ne se fait pas par ordinateur, mais plutôt comme à l’époque. Le truc, c’est de trouver la bonne recette pour être le plus rapide possible tout en restant dans ses limites de conducteur.
Le quartier général de Tremblant
La grande majorité des activités de l’organisation se déroulent au Mont-Tremblant. Malgré cela, la série aimerait bien explorer d’autres horizons en allant découvrir d’autres circuits. Une petite parenthèse historique : à l’origine, la piste à Tremblant avait été bâtie pour permettre aux employés des stations de ski environnantes de continuer à travailler l’été tout en restant dans la région, ce qui permettait, d’une certaine façon, une bonne rétention du personnel.
Ces dernières années, les dirigeants de Tremblant ont dû dépenser beaucoup d’argent en frais d’avocats de toutes sortes au détriment d’investir dans les infrastructures. Les règlements sont devenus très sévères par rapport au bruit. Des tests de sons statiques doivent être faits. Tant que le son en provenance du silencieux n’est pas sous les 92 décibels, la voiture ne peut rouler sur le circuit. Si cette limite est dépassée une fois la voiture en piste, ses activités sont terminées pour la fin de semaine. Il y a trois stations de prise de son mobile tout autour du complexe, qui jouent le rôle d’espion. Tout cela pour seulement quelques individus qui se plaignent et qui se sont possiblement installés en sachant très bien qu’il y avait une piste de course près de leur lieu de résidence.
Cela devient tellement pathétique d’écrire cela constamment de texte en texte, mais c’est malheureusement la triste vérité. C’est navrant pour les amateurs, plusieurs séries ne peuvent plus se déplacer à Tremblant à cause des restrictions mises en place par les autorités locales.
Une première visite à Trois-Rivières
En 2024, la série a fait ses premiers pas au Grand Prix de Trois-Rivières. Ce sont 16 bolides qui ont pris d’assaut les rues de la capitale de la Mauricie. Il y aurait pu avoir beaucoup plus (environ 40 pilotes s’étaient montrés intéressés), mais dû au manque de place dans les paddocks, seulement 16 inscriptions ont été acceptées. La série croyait bien à l’origine être présente pour la 50e édition de l’évènement, mais cela n’a pu se concrétiser.
Malgré tout, en plus du Salon de l’auto de Montréal, Paul Giroux est satisfait de la visibilité obtenue en 2024. Une discipline qui est en pleine croissance année après année. Du côté de Trois-Rivières, les voitures ont utilisé du gaz synthétique P1 avec un indice d’octane d’environ 100, alors que le carburant habituel est à 110. Cela ne causait pas de problème pour les huit cylindres, mais les plus petits moteurs devaient être ajustés, car ceux-ci fonctionnent à plus haut taux de compression.
C’est le journaliste Éric Lefrançois qui a mis en contact la série avec Dominic Fugère. Il faut l’avouer, le « fit » était parfait pour les nostalgiques de l’âge d’or du GP3R. Cela faisait longtemps que les dirigeants des courses « vintage » avaient Trois-Rivières dans leur mire. Au moment d’écrire ces lignes, rien n’a encore été confirmé pour 2025 pour une seconde participation au GP3R.
En conclusion
Qui n’a jamais dit que ce qui est « vintage » ne peut pas être rafraîchissant ? Paul Giroux et sa famille sont impliqués depuis très longtemps dans le monde du sport automobile québécois. D’ailleurs, Paul caresse le rêve de voir un Jacques Bienvenue faire quelques tours de piste derrière le volant d’un des bolides de la série. Éric Descarries, qui suit assidûment les activités du groupe, a déjà été le professeur de Giroux.
Nous sommes ici en présence d’un grand club social de « grassroots racing », comme dans le bon vieux temps. On ne se le cachera pas, on est plusieurs à s’ennuyer de cette belle époque où le plaisir de vivre était encore bien présent. Il me semble que vivre dans les années 70-80-90 était beaucoup moins difficile qu’aujourd’hui, avec toute la folie qui nous entoure.
Que les dieux bénissent les rois de la course !