Visiblement, Dame-Nature ne veut absolument pas collaborer pour permettre la présentation d’un programme de courses à l’autodrome Drummond. Les programmes du championnat de mi-saison ainsi que celui du concours d’arrêt aux puits comprenant une finale de soixante tours chez les modifiés ont dû être carrément annulés en raison de la pluie. Ça doit être drôlement frustrant pour tout le monde, principalement pour le promoteur, d’avoir des samedis de courses constamment reportés pour cause de mauvais temps. Ce dernier prépare la piste et investit des heures pas possibles pour la rendre dans des conditions optimales pour les pilotes. Tout ça est fait dans un seul et unique but: que le spectacle soit au top et que les spectateurs passent une bonne et belle soirée, étant sur le bout de leur siège pendant la totalité des courses et que les pilotes soient en feu, Yan aura rempli son mandat haut la main. Ils traversent, lui et sa petite équipe, un temps dur, mais on va se croiser les doigts pour que la température soit de son côté pour les prochains programmes et qu’il y ait des courses mur à mur d’ici la fin de la saison.
Les pilotes doivent également ronger leur frein depuis deux semaines. Il y a toujours des options d’aller courser ailleurs quand la météo se déchaîne sur Drummond, mais il n’en demeure pas moins que tout ce beau monde est déçu. Comme certains m’ont mentionné dans les textes précédents, ça fait partie des courses et c’est quelque chose que l’on ne peut pas contrôler. Ça change les plans et on est obligé de s’y conformer. Je suis tout autant déçu que vous! Mon matériel était presque prêt pour aller prendre d’autres belles photos, mais le grand boss en a décidé autrement.
Je me rends compte que d’écrire me permet, non seulement d’en dévoiler un peu plus au niveau personnel de ma vie privée, mais aussi de me rappeler de beaux souvenirs de mon enfance et mon adolescence. Même mon père doit avoir un petit pincement au cœur en me lisant. Il doit se dire: comment ça tu sais ça toi…lolll Essayez de convaincre un enfant de dix ans que ce n’est pas ce qui s’est passé réellement. Je ne vous compterai sans doute pas toutes mes histoires en vous croisant aux courses pour entamer une conversation. Il y a quelque chose qui se passe à l’écrit que je ne peux pas expliquer. Avec toutes les heures passées dans le garage à préparer la voiture pour le prochain programme, rien de plus frustrant que de voir sa journée être terminée après seulement quelques tours de pratique parce que la transmission a rendu l’âme. Quand tu es seulement en fin de matinée et que les courses peuvent se terminer aux petites heures du matin, les journées sont longues en s’il vous plaît. Le voyage, en partant de Chibougamau, paraît tout d’un coup très très long. Je comprends le sentiment de déception qui doit habiter tout le monde en ce moment.
Bon, revenons aux courses, à vos histoires! J’ai décidé de m’intéresser aux parcours des femmes dans le monde des courses sur terre battue. Comme elles occupent une place dans un monde essentiellement masculin, je voulais en connaître plus sur leur cheminement. J’ai piqué un brin de «jasette» avec la pilote du bolide modifié #36, Chantal Provencher, ainsi que Josée Fortier et Maxime Dupuis qui coursent toutes les deux en Modlite. Elles ont parcouru un chemin bien différent les unes des autres et je voulais évidemment en savoir un peu plus. Avec un bon mélange d’expérience et de jeunesse, le portrait des femmes en course automobile me paraît plus qu’intéressant. GO, on part!
Chantal Provencher est dans l’environnement des courses sur terre battue depuis plus de dix ans. Les motivations de chacune à se diriger vers la course automobile sont différentes. Encore une petite coche de plus à vouloir en apprendre davantage sur leur personnalité ainsi que sur les principales raisons qui les ont poussé à se diriger vers un sport de haute vitesse. «J’étais tannée de regarder Dany courser sans y participer aussi. J’ai débuté en 2009 en Midget, deux courses. Une classe de Lightning sans aileron. Les moteurs étaient des moteurs de moto et si tu avais un 600cc, 900cc tu étais acceptée. En 2010, une saison complète en Lightning. J’ai fait quatre ans en Lightning Sprint. Ensuite, trois ans en Sportsman» me racontait Chantal. Celle qui a été recrue de l’année en Modifié en 2018 continue toujours de répondre présente à chaque fin de semaine de course. Je n’ai aucune idée à quelle vitesse roule un modifié, mais je suis abasourdi à chaque fois que je les regarde, que je la regarde rouler. Ça m’impressionne!
J’ai commencé seulement en 2014 à faire de la photo sportive. Les courses sur terre battue sont arrivées sur le tard dans mon parcours et je constate que les femmes sont de plus en plus présentes. Elles sont en constante progression, peu importe la classe où elles débutent et qu’elles évoluent. Comme les gars dominent le plateau, du moins le dominaient, je me questionnais sur la réaction qu’ils ont pu avoir quand ils ont vu que des femmes allaient courser avec eux et jusqu’à quel point le cheminent des femmes en a été affecté. Chantal aurait pu se laisser abattre mais, au contraire, c’est plutôt devenu une source de motivation: «Au début, dans chaque classe, ça pas été facile. Faut faire sa place et il y a toujours l’orgueil de mâle…loll Ça été et c’est encore difficile parfois, mais tu dois te faire une bulle. Souvent, je me sers de ça pour me motiver encore plus». C’est facile de se cacher derrière son ordinateur et son clavier pour écrire tout ce qui nous passe par la tête. Je comprends des fois que l’on peut dire des choses que l’on regrette amèrement, mais bien souvent le mal est déjà fait. Pour Chantal, il aura fallu faire un travail psychologique pour ignorer les mauvais commentaires à son endroit et ainsi garder un bon moral: «Il a fallu me faire une carapace et surtout croire en moi. J’ai trouvé des trucs où je me focalise sur ma course et je fais ma bulle. C’est un travail psychologique». À mon humble avis, fille ou pas, une fois rendue sur la piste, c’est le même terrain de jeu pour tout le monde. Elle a toute mon admiration pour tenir son bout quoiqu’il advienne.
Je souhaitais en savoir plus également sur le parcours d’une pilote pour qui c’était le baptême d’aller sur une piste de course. Je me voyais dans l’obligation d’aller explorer ce chemin-là pour avoir un point de vue différent et ainsi apporter une teinte différente à mon texte. Je me suis donc dirigé vers la classe Modlite où la pilote, Maxime Dupuis, a fait ses premiers tours de piste cette année. Celle qui a seulement trois courses derrière la cravate ne regrette aucunement son choix: «Les courses me permettent de sortir de ma zone de confort et de dépasser mes limites. Ça m’apporte beaucoup sur le côté personnel». Pour faire un parallèle avec la photo sportive, quand j’ai commencé à suivre de façon un peu plus assidue les courses, en général, je ne connaissais nullement les pistes. J’ai posé des questions aux autres photographes qui savaient qui étaient les pilotes à suivre et qui suivaient le sport depuis plus longtemps que moi. J’en profitais pour leur demander où exactement me placer pour dénicher les meilleures photos possibles. Par la suite, c’était à moi d’explorer pour développer mon propre style. Fallait bien que je commence à quelque part! Pour Maxime, elle a d’abord regardé les courses et suite à une nouvelle rencontre dans sa vie, tout s’est enchaîné. Elle a cependant pris un certain temps avant de prendre sa décision et de se lancer finalement dans l’aventure des courses: «Mon copain, que j’ai rencontré l’été passé, est présentement à sa douzième saison de course sur terre battue. J’ai donc eu la piqûre comme spectatrice, pour ensuite avoir la proposition de conduire sa deuxième voiture. Ce fût une décision réfléchie, mais je suis une fille qui a toujours aimé tout ce qui a un moteur. J’hésitais à cause de mon manque d’expérience, mais je me suis dit que si je ne prenais même pas la peine d’essayer, que je n’en aurais jamais».
Toujours en catégorie Modlite, une autre pilote, qui gravite autour des courses sur terre battue depuis plusieurs années, est Josée Fortier. Elle s’est assise derrière un volant pour la première fois du côté de Saint-Guillaume dans la classe féminine en 2005 à bord d’un dodge néon blanc numéro 87. «Mais j’ai acheté ma première voiture, un mini-mod, en 2013. Ensuite, en 2015, j’ai loué mon fucking 7 en modlite et en 2017, j’ai commencé à courser pour vrai avec mon 08» a renchérit Josée sur la suite de son parcours en course de dirt. Et qu’en est-il de cette petite étincelle qui a allumé Josée pour se lancer également dans l’aventure des courses sur terre battue et de ne plus jamais regarder en arrière: «Un moment donné, il y a une personne qui m’a trouvé une voiture pour la course de femmes et ça été la piqûre, mais ma 1ère course féminine à Granby m’a marqué. J’ai un souvenir très clair de rouler sur le backstrech avec le tableau indicateur. C’est là que j’ai voulu avoir ma propre voiture. Ça aura pris presque 10 ans». Elle me racontait que depuis son déménagement à Granby en 2003, elle n’a plus eu aucun week-end de mai à septembre. (rire) Même si elle était toute seule, elle a tellement voulu avoir un char de course qu’elle a décidé quand même d’embarquer dans l’aventure. Et pour reprendre ses propres mots: c’est ça avoir une maudite tête de cochon. Manifestement, elle non plus ne regrette aucunement d’avoir fait le saut en course automobile: «D’une certaine façon, c’est une grande réalisation. La plupart des femmes qui coursent le font grâce à leur chum ou leur père.. Ce qui n’est aucunement mon cas! Faut vraiment être passionnée pour sauter dans un tel projet».
Quand on voit qu’une passion peut nous animer, nous habiter à tel point d’y laisser toutes ses tripes, plus rien ne nous fait décrocher. On fonce droit dans le tas et advienne que pourra. Je crois que c’est cette petite voix intérieure qui a fait dire à Maxime et Josée de continuer et de ne jamais abandonner. Vous avez toute mon admiration les filles.
Même si Maxime en est qu’à ses tout débuts, j’ai voulu avoir ses premiers commentaires concernant son arrivée au sein des courses sur terre battue. C’est-à-dire comment les gens, les gars plus spécifiquement, ont réagi quand ils ont vu qu’une femme allait s’ajouter au peloton et allait courser avec eux. Il ne semble pas avoir eu trop de chialage suite à sa venue dans la série: «J’ai énormément de support et d’encouragement! Autant par les pilotes que par les yeux extérieurs. Je ne sens pas du tout que je suis traitée différemment. Au contraire, on me souligne souvent que “c’est le fun une fille qui course!” et qu’il y en a des excellentes dans le domaine». Pour la pilote du modlite 08, c’est sensiblement le même constat: «En général, il n’y a aucun problème, mais il y en a qui n’aime pas se faire dépasser par une fille, mais c’est ben ben rare». En poursuivant la discussion avec Josée, elle me mentionnait que les pilotes, que ce soit sur et à l’extérieur de la piste, demeurent respectueux envers elle et comme ce n’est plus un sport uniquement masculin, leur mentalité a bien changé.
Et pour ceux et celles qui peuvent avoir et qui continuent d’avoir de mauvais commentaires à l’endroit des gens qui ne sont pas à leur place, ça doit devenir lourd de toujours vouloir les ignorer sans qu’elles se sentent affectées. Pour la pilote du modlite d12, il faut faire abstraction de tout ça et se concentrer uniquement sur ce que l’on peut contrôler: «Je crois que l’important dans tout ce que l’on fait, c’est de se concentrer sur les choses sur lesquelles on a du contrôle. Nous n’avons pas le contrôle sur ce que les gens pensent de nous, mais on a le contrôle sur comment on réagit à ça. Quand on parle d’une nouvelle passion, il faut comprendre qu’on débute tous à quelque part et que l’on n’apprend pas tous au même rythme, que l’on soit un garçon ou une fille. Il faut être indulgent et ignorer toute critique non-constructive en continuant de faire de notre mieux en se rappelant pourquoi on le fait».
Voilà, vous en savez maintenant un peu plus sur le parcours, le cheminement de mes trois collaboratrices: Maxime, Josée et Chantal. Comme ça été, encore une fois, un week-end à l’eau, j’ai voulu poursuivre dans la même veine que le texte précédant, à savoir: est-ce qu’elles réussissent à mettre les courses de côté pour pouvoir faire autres choses? Encore une fois, même si elles forcent ben ben ben fort, les courses finissent toujours par gagner et avoir le dessus sur le reste. Si j’en crois les propos de Maxime Dupuis, quand il est question de course, c’est all-in ou rien du tout: «J’ai l’impression que quand on s’embarque dans le monde des courses, c’est tout ou rien. C’est une passion qui est demandante quand on la fait comme il faut. Pour ma part, je ne réussis pas à décrocher (surtout avec un autre pilote à la maison) mais c’est positif!».
Pour résumé les propos de Josée Fortier: «C’est la pire drogue qui existe…lolll». On peut donc en déduire que c’est le même son de cloche de son côté. Il est très dur de complètement faire le vide et de mettre les courses de côté. Pour elle, impossible d’aller faire une balade en nature ou encore d’aller courir: «J’ai pas vraiment le temps. Avec le travail, la maison et tout ce que ça implique, la job à l’autodrome Granby et Drummond.. L’hiver, c’est plus relaxe, mais c’est pas le rush des courses…loll». L’intermission lors de programme de course est le seul vrai moment pour Josée de laisser tomber la pression et de regarder les courses. Ce sentiment de légèreté, parce qu’elle a la tête ailleurs, n’est cependant que de très courte durée puisque quand la soirée est terminée, pour de vrai, les courses reprennent le dessus.
Cependant, pour Chantal Provencher, c’est complètement différent. Elle laisse amplement d’espace pour faire des activités qui lui permettent de décrocher: «Je fais du yoga, du kayak, je marche avec de la musique, monte des montagnes. Là, j’ai du terrassement à faire car j’ai eu beaucoup de rénos dont le drain autour de la maison, un patio de béton. L’hiver, je suis dans le jus au travail, donc je me donne à fond».
Enfin, est-ce que de regarder les courses, assise dans les estrades ou sur le toit de son camion, c’est véritablement décroché ? Pour de vrai? J’ose croire que oui parce que ce n’est pas assise dans sa voiture, derrière le volant, à conduire dans le trafic pour essayer de rattraper le meneur de la course en sortant d’une courbe sur trois roues. C’est comme essayer de sortir les courses de la fille. Bonne chance!
C’était la même chose quand on revenait des courses en plein milieu de la nuit le lundi après une fin de semaine de course mouvementée. Mon frère et moi avions plus ou moins connaissance de ce qui se passait réellement parce que l’on dormait depuis belle lurette, mais disons que quelques heures, tout au plus, séparaient le moment qu’on arrivait dans la cour à la maison et le moment que l’auto était sur les pattes dans le garage pour commencer à la réparer. Le temps que mon père gère sa journée à son garage, que Rénald complète sa «run» de lait et que Bruno termine sa journée dans les mines. Ce dernier, semble-t-il, a monté la voiture de toute pièce. Du bumper avant jusqu’à l’arrière. Tout était centré sur les courses. Quand il n’y avait pas de courses les fins de semaine, choses qui arrivait très rarement, qu’est ce qui se passait, vous pensez ? Je vous laisse deviner…lolll