C’est terminé pour Jean-François Corriveau !

Crédit photo : Yannick Légaré

JF Corriveau accroche son casque.

Tout comme moi, ceux qui connaissent Jean-François Corriveau savent que JF est un personnage intense. Il ne fait pas les choses à moitié, ayant un budget illimité, il veut apprendre, comprendre et n’a jamais eu peur de mettre des heures dans le garage et si, au calendrier, il y a 2000 courses…ben JF va toutes les faire !

Mais lorsque que j’ai eu vent que Jean-François Corriveau dit le « Grinder » avait pris la décision d’accrocher son casque, pour moi cette nouvelle a eu un peu l’effet d’une bombe, car je ne voyais pas le « Grinder »  faire autre chose comme passe-temps que de faire des courses.

 J’ai comme eu un doute en me disant… Ben voyons ! je le connais un peu, JF c’est une personne qui peut changer mille fois d’idées, il n’est surement pas sérieux !

Mais si c’était vrai cette fois-ci? À l’aube de la cinquantaine, « Le Grinder » a peut-être vraiment décidé de mettre les freins sur les courses ? C’est plus fort que moi, faut que j’appelle JF.

 Parle-moi JF! tu prends ta retraite des courses ? Tu as perdu la flamme ?

Écoute Steve, ça me surprend que t’en avais pas encore entendu parler, car ça fait un petit bout voire même une couple de mois que j’ai pris ma décision. Le monde le sait parce qu’il y a un paquet de gens qui sont venus acheter mes affaires. Ça me surprend que ça vienne tard à vos oreilles.

J’avais entendu que tu vendais ton stock de courses, mais je croyais que c’était pour te rééquiper au complet comme la plupart des grosses équipes font chaque année !

Non, sérieusement, je te dirais que depuis deux ans peut-être, la dernière saison puis l’autre année d’avant, je trouvais ça un petit peu tirant, dans le sens que j’étais moins là quand la saison commençait, ça devenait à être un poids et pas mal moins de l’amusement, c’était comme « Bon, ça recommence ». Moi, je coursais beaucoup, je suis seul, je n’ai pas d’équipe. J’ai essayé de me former des équipes, j’ai essayé d’engager, mais c’est vraiment dur aujourd’hui de trouver quelqu’un… même si tu le payes. Dire à ces personnes qu’à partir du mois d’avril jusqu’à novembre, tu n’auras pas de Week-end, tu n’auras pas deux soirs par semaine, pas de famille, c’est ça les courses. Je me demande comment les autres équipes font pour trouver du monde, mais moi, je n’étais pas capable. De plus, je suis un excessif. Moi, je ne suis pas capable de courser juste une fois par semaine pour m’amuser. Un coup que ça commence, je veux toutes les faire. J’ai de la misère à être raisonnable.

Mais JF, tu vas t’ennuyer, intense comme tu étais aux courses, ça va te faire un vide ?

Non je ne pense pas, car j’ai plusieurs projets. Je suis en train de bâtir un hôtel, j’ai fait un autre restaurant Grinder à Laval et une autre boucherie, puis j’ai acheté de l’immobilier. J’ai le goût de travailler dans mes affaires. Les courses, ça devenait de plus en plus comme un poids pour moi plutôt qu’un passe-temps.

Puis, en même temps, il est arrivé encore des changements de règlements. Est-ce que c’est à cause du changement des règlements, les tires, que je lâche? Non. Mais quand tu y penses déjà, quand tu as déjà des doutes à savoir si tu continues ou pas, chaque petite affaire qui se rajoute, ça te fatigue, mais ce n’est pas la raison pour laquelle j’arrête même si je trouve que des fois, ils mettent ça bien compliqué où ça pourrait être plus facile…

Le fait d’être très intense dans les courses, est-ce que ç’a négligé tes restaurants ?

Un peu oui ! Car depuis six ans, à partir du mois d’avril jusqu’au 1ᵉʳ novembre, mes restaurants n’existaient plus, je ne venais pas au restaurant. J’étais à mon garage à 6h00 le matin. Je te dis, moi, j’ai été chanceux de pouvoir faire ça. Mes business sont encore santé. Je ne pousserai pas ma chance. Cette année, quand je suis revenu au resto, j’ai trouvé que j’avais eu plein d’affaires à corriger… Avec le manque de staff qu’on a eu, avec toute l’augmentation des prix de la nourriture et tout ça, je travaille fort pour replacer le tout, ça va encore bien, mais j’ai été chanceux.

Moi, je ne travaillais plus, c’était juste des courses. Chaque matin, j’étais comme Sheppard, j’avais juste ça dans la tête. J’étais excessif.

Je me considère chanceux. Ç’a été des beaux moments, j’ai eu bien du fun et j’ai rencontré du bon monde.

Si je comprends bien ta décision a été mûrie ?

Oui c’est très très mûri, parce que quand j’ai pris ma décision, c’est comme si je me m’enlevais un poids!

Je ne changerai pas d’idée, je vends tout. Je n’ai même pas décidé de garder un char pour y aller, des fois qu’il y aurait une rechute, non ! Je ne garde même pas une remorque, je ne garde rien, même que je veux vendre le garage aussi à Saint-Denis, je ne garde vraiment rien !

Penses-tu avoir du regret ?

Je ne pense pas ! Je l’ai fait, je ne regrette rien. J’ai eu du plaisir, j’ai fait une année en 2006 en sportsman et ensuite je suis revenu tard, j’ai commencé à 44 ans en catégorie « Modifié ». C’est tough ! en plus avec les gros blocs, je me suis donné, j’ai donné tout ce que j’ai pu. Je ne regrette rien.

Jean-François est-ce que ton côté excessif a hypothéqué la vie de famille ?

Oui c’est sûr! Ma mère, elle a 75 ans, je ne la voyais jamais l’été. Elle est en Floride l’hiver. Je ne voyais pas mon monde. Ma famille ne me suivait pas. Ma blonde ne venait pas. Moi, je me coupais de tout le monde. Je me coupais de ma famille et je me coupais de mes business.

À un moment donné, je suis rendu ou j’ai le goût de voir plus mon monde. J’ai quand même la chance de pouvoir faire ce que je veux, voyager plus, faire d’autres choses. Je ne serai pas pogné chez nous à me tourner les pouces, j’ai plein de beaux projets à faire, j’ai le goût de me donner là-dedans.

Je suis rendu grand-père, je veux passer du temps en famille cet hiver, j’ai acheté un chalet à Sutton, puis moi, j’ai tout le temps fait du ski, ça faisait quelques années que je n’en faisais plus, là, j’ai recommencé à skier, puis là, le chalet, la famille à toutes les fins de semaine qui vient, ma fille et mon petit-fils, en plus j’ai montré à mon petit-fils à faire du ski. C’est le fun, voir son monde, avoir du temps, du temps de qualité. Ça m’a fait réaliser ça cet hiver. C’a peut-être aidé à ma décision aussi. C’est un passe-temps qui coûte cher, il ne faut pas que ça devienne une obligation. C’était comme un job, c’est comme si ça ne me tentait plus et quand tu payes une coupe de 100 000$ ou 200 000$ par année pour aller aux courses pis ça ne te tente pas… ce n’est pas normal ! Ça me rendait plus de mauvaise humeur que de bonne humeur. Un passe-temps, c’est censé te faire relaxer. Moi, j’ai 150 employés dans mes business et ça roule par-là, mais si je te dis que les courses étaient rendues plus dures et plus stressantes que mes business…c’est qu’il y a quelque chose qui cloche!

Par contre, ç’a été correct, ça m’a défoulé. Ça m’a bien changé les idées, il y a une affaire qui est sûre, c’est quand j’allais aux courses, on ne parlait pas des restaurants, je n’y pensais pas, ça me changeait vraiment les idées, c’était bon pour ça !

Si je comprends bien, l’aube de la cinquantaine te frappe un peu en pleine face ?

Oui parce que je pense souvent à Dany Bilodeau qui est décédé et à Serge Desjardins qui est malade, ça m’a fait tellement réfléchir et honnêtement, tu ne sais jamais ce qui te pend au bout du nez. J’ai eu une belle période dans les courses. Je suis « malcommode » donc, je devrais être bon pour vivre jusqu’à 95 ans, mais on ne le sait pas, donc je veux profiter de la vie !

Donc JF les courses c’est fini pour toi ? Tu n’aimerais pas conduire pour d’autres équipes ?

Non, pas courir pour un autre, mais si jamais un jour ça me démange trop, ça ne serait pas de courir, mais avoir mon équipe avec quelqu’un qui conduirait pour moi. J’ajusterais la voiture, je trippe à faire ça, c’est là-dedans que je suis le meilleur et dans les « set-up » grâce à Matt Sheppard, j’ai appris beaucoup, donc une voiture de course, ce n’est plus un secret pour moi.

Au final j’ai eu une belle discussion avec un Jean-François Corriveau serein et calme comme j’ai rarement vu. Comme on peut voir, à l’aube de la cinquantaine (même si c’est encore jeune), la jeunesse pousse et la vieillesse se tasse tranquillement, les priorités changent, on pèse moins fort sur l’accélérateur pour mieux prendre le temps de regarder le décor de la vie.

Bonne retraite Le « Grinder »…..On se revoit un jour aux courses ?

Président / Chroniqueur
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