La trajectoire réfléchie de William Larue

Crédit photo : Francois Richard

Originaire de Québec, William Larue baigne dans le milieu de la course automobile depuis l’enfance. Son grand-père possédait déjà une voiture de course, pilotée par d’autres, et son père a suivi la tradition en s’associant à des noms bien connus du milieu, comme Alexandre Gingras, Carl Allard ou Alex Labbé. Personne dans la famille n’avait pris le volant… jusqu’à William.

À 13 ans, il traînait déjà autour des paddocks, fasciné par les moteurs, l’ambiance et la compétition. En 2017, il se lance sérieusement dans le monde du « simracing » et y excelle rapidement. Classé parmi les meilleurs Canadiens sur piste ovale, il franchit ensuite la ligne vers le monde réel avec confiance et méthode.

Cependant, William n’est pas qu’un pilote. Après deux ans en génie mécanique de l’Université Laval, il s’est dirigé j’ai à l’université de Montford en Angleterre pour participer au « National Motorsport Academie », un programme spécialisé qui forme les ingénieurs du sport automobile de haut niveau. Il a ensuite intégré l’entreprise familiale Larue, où il agit aujourd’hui comme superviseur aux achats, tout en poursuivant sa passion pour la course à temps partiel. Une double vie qu’il gère avec minutie.

Une saison tournée vers l’expérience… et la performance

Pour 2025, William a choisi un calendrier mixte, orienté vers la découverte de nouveaux circuits et la compétition ciblée. « Je vais faire dix courses ACT US, incluant trois au Québec, plus trois en NASCAR Canada », explique-t-il. Parmi les pistes qu’il visitera : Oxford, White Mountain, Seekonk, Montmagny, Vallée-Jonction et Antigonish.

Les deux voitures de l’équipe Larue, habituellement actives à temps plein au Québec, ne participeront qu’aux courses ACT US tenues ici. « On priorise les épreuves payantes, comme le Bacon Bowl ou le Duro King », précise-t-il.

En NASCAR Canada, il pilotera une voiture acquise récemment, qui était auparavant louée. « Avoir notre propre auto, ça nous donne plus de latitude. On veut faire de la qualité, pas de la quantité. »

« Ce que j’aime, c’est courir intelligemment »

Sur la piste, la philosophie adoptée est claire : rouler propre, respecter les autres, et optimiser la voiture sans agressivité inutile. « J’aurais pu pousser Kevin Lacroix dans un coin pour le dépasser à Montmagny l’automne dernier. Mais je ne voulais pas faire ça. Je voulais le passer proprement. »

Cette mentalité lui a valu une solide réputation dans le milieu. « Quand tu cours sans accrocher les autres et que tu es rapide, les gens te respectent. Ta réputation se bâtit là-dessus. » Il ajoute que l’inverse est aussi vrai : « Si tu es toujours mêlé à des accrochages, même quand ce n’est pas toi, ça finit par te coller à la peau. »

Parmi les pilotes avec qui il aime se mesurer : Jeff Côté. « On se voit souvent sur la piste, on se bat fort, mais ça reste toujours clean. »

L’ingénieur sous le casque

Ce qui distingue William de plusieurs autres pilotes, c’est son sens aigu de la mécanique. Il connaît sa voiture comme le fond de sa poche. « Je suis capable de dire exactement ce que le char fait, à quel moment, et pourquoi. C’est précieux pour l’équipe. »

Il travaille principalement sur les suspensions. « C’est là que je suis le plus efficace. Je laisse les gars gérer le moteur, mais je sais ce qu’il faut ajuster pour avoir le comportement que je veux. » Il insiste sur le fait que le succès vient autant du garage que de la piste : « Tu peux avoir un char neuf, si ton setup est mauvais, tu n’iras nulle part. »

Cette capacité, il ne la doit pas seulement à l’expérience, mais aussi à sa formation. William a étudié en génie mécanique à l’Université Laval, puis a été sélectionné pour passer un an dans une université anglaise réputée, au sein d’un programme exclusif en ingénierie du sport automobile. « C’est un programme qui forme les futurs ingénieurs de haut niveau en course automobile. On était une cinquantaine à être acceptés. » Là-bas, il a approfondi des notions de dynamique du véhicule, de simulation et d’optimisation du comportement sur piste, entouré d’étudiants visant la Formule 1 ou les grandes séries d’endurance.

Même s’il a choisi de ne pas poursuivre cette voie comme carrière principale, cette année d’études à l’étranger a marqué un tournant. « J’ai compris ce que ça prenait pour faire marcher une voiture de course, au-delà du pilotage. C’est une base que j’utilise chaque fois que je touche à un setup. »

Son équipe, justement, fonctionne comme une horloge bien huilée. « Tout le monde sait quoi faire. Il n’y a pas de bordel dans notre équipe. On est prêts, on est constants. »

Une approche humble et stratégique

Contrairement à plusieurs pilotes qui visent une carrière à temps plein, William fait le choix délibéré d’un calendrier flexible. « J’ai un job, une vie. Courir quand ça fait du sens, c’est ce qui me convient. Je cours pour le plaisir, mais aussi pour bien faire les choses. »

Ce choix ne l’empêche pas d’avoir de grandes ambitions. Il garde l’œil ouvert sur une possible saison complète en NASCAR Canada, surtout si l’équipe acquiert une voiture de routier. Mais il préfère évoluer à son rythme : « On verra où on en est à la fin de l’année. »

La course… et la réalité du paddock

William n’ignore pas les critiques, souvent basées sur la perception qu’il bénéficie de plus de moyens que d’autres. « On a entendu dire qu’on pratiquait dix fois plus que tout le monde… On est allé deux fois pratiquer l’an passé. »

Selon lui, le vrai avantage de son équipe, c’est l’expérience et la rigueur. « On a des gars comme André Beaudoin et Mario qui connaissent ça depuis 20 ans. C’est cette connaissance-là qui fait la différence, pas les dollars. »

Il déplore une certaine jalousie dans le milieu. « Il y a une mentalité au Québec où on regarde plus ceux qui réussissent avec envie que comme des exemples à suivre. C’est dommage. »

Conclusion : un pilote à suivre, ici et ailleurs

À 25 ans, William Larue représente une génération de pilotes réfléchis, complets et passionnés. Son intelligence technique, sa conduite propre et sa capacité à analyser une voiture font de lui un compétiteur redoutable – et respecté.

Que ce soit sur les pistes du Québec ou sur celles des États-Unis, il roule avec une philosophie qui lui ressemble : ne rien précipiter, tout maîtriser… et foncer quand c’est le bon moment.

Que les dieux bénissent les rois de la course !

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