Au p’tit tour

En plus de faire partie de l’équipe en tant que photographe, j’aurai le plaisir de vous faire part de mes commentaires, de mes impressions à la suite de chaque week-end de course. Ça va être, pour une première chronique, une belle entrée en matière que de vous présenter qui je suis, d’où je viens et de comment le goût des courses est venu qu’à m’habiter, et ce, depuis de nombreuses années.

         Pour ceux et celles qui ne me connaissent pas, j’ai 42 ans et je suis originaire de Chibougamau, dans le nord du Québec. Ce n’est pas très surprenant que je sois attiré par les courses en général, que ce soit sur terre battue ou encore sur asphalte. D’aussi loin que je me souvienne, mon père, avec quelques amis, ont construit et inauguré, au début des années 80, l’autodrome de Chibougamau. Évidemment, mon père avait son stock-car dans son garage et participait aux courses. Ma mère, un de mes oncles et une de mes tantes, ont tous embarqué dans l’aventure en tant que pilotes. C’est très vite devenu une affaire de famille et l’activité à faire les dimanches après-midi. Cela a duré quelques années tout au plus. L’aventure s’est poursuivie avec les courses sur asphalte. Mon père a possédé deux voitures de course. On partait les week-ends pour se rendre à Sainte-Croix, Saint-Félicien, Chicoutimi ou encore Montmagny. Trois places différentes à toutes les fins de semaine. J’ai passé la majorité de mon enfance et une partie de mon adolescence à suivre mon père aux courses les fins de semaine durant l’été. On revenait la plupart du temps aux petites heures du matin les lundis.

         Je n’ai pas vraiment besoin de vous dire le nombre incalculable d’heures que mon père a passées dans le garage, avec sa petite équipe, à réparer la voiture, à débosseler des bouts de tôle pour que tout soit ok pour la fin de semaine suivante. Une fois, le voisin, que l’on appelait affectueusement papa Jeannot, est sorti de chez lui en fin de soirée en se demandant qu’est-ce qui faisait ce bruit-là…loll Mon père avait travaillé tellement fort toute la semaine avec ses mécanos pour mettre la voiture en ordre. Ils se sont dit qu’il fallait bien voir si le nouveau moteur fonctionnait bien. Un son aussi pur que ça, je n’avais jamais entendu ça. C’était beau de tous les voir avec le sourire fendu jusqu’aux oreilles. Et aussi le voisin en robe de chambre qui se demandait ce qui se passait …. lolll Vous voyez que le goût des courses est bien présent depuis fort longtemps.

         Je vous disais que l’on avait souvent trois jours de course. Ça pouvait être Ste-Croix le vendredi soir, Saint-Félicien le samedi soir et on pouvait retourner à Ste-Croix le dimanche après-midi. Montmagny, Chicoutimi et Sanair s’alternaient une journée pendant la saison. Des heures et des heures sur la route, ça va de pair avec les courses. On partait de Saint-Félicien après les courses, on couchait à l’hôtel à Québec pour se rendre à la piste le lendemain avant-midi. Comme le « set up » n’était pas du tout le bon entre les deux pistes, les mécanos et mon père reculaient légèrement l’auto sur le « trailer » et le changeait. Le stationnement, pour ne pas dire le champ, sur le bord de la route devenait bondé assez rapidement. Et pour ceux et celles qui ont déjà été à Ste-Croix, je vous défie de me dire quand est-ce qu’une soirée de course se terminait à une heure décente. C’était l’enfer! Un bon déroulement, sans accrochage et sans drapeau jaune qui rallongeait les courses de façon interminable, ce n’est jamais arrivé. Je vous rappelle que l’on était très jeunes, mon frère et moi, et on était dans les estrades dès midi et ça pouvait aller jusqu’à minuit, une heure du matin. 

         Je me compte très chanceux, à mon avis, d’avoir connu et vécu l’âge d’or des courses de stock car au Québec. Dans les meilleures années, le championnat LMS avait régulièrement de 30 à 35 voitures à chaque départ. Si vous ne me croyez pas, demandez à Martin Roy, le père de Félix et Jérémy. Il coursait à bord du LMS 90 de couleur bleu/mauve. Je pourrais ressortir mes vieux albums de l’époque et vous montrer des photos. Je me promenais avec mon 36 poses dans les puits et je prenais une photo de toutes les voitures. J’avais un plaisir fou à faire ça à chaque samedi soir. Le 67 de Renaud Blais, le 56 de Marc Beaudoin, le 14 de Daniel Guay, le 26 d’Alain Maltais, le 29 de Gilles Thibeault, le 9 d’Yvon Bédard, le 80 de Donald Theetge, le 42 de Donald Forte étaient des figures dominantes de la série. Il y avait aussi, bien sûr, le meilleur, mon papa à bord de son bolide numéro 11 de couleur jaune.

         C’est certain que sur un circuit de 5/8 de mile (Québec) ou encore de ½ mile (Saint-Félicien), il risquait d’y avoir quelques accrochages. Les voitures avaient très souvent besoin d’un alignement après un week-end. Je me rappelle une fois, à Sanair, sur le petit circuit, Yvon Bédard avait rentré, mais quand je vous dis rentré, dans le mur dans le tournant 3. C’était hallucinant de voir à quelle vitesse il avait frappé le mur. C’est à se demander s’il avait touché aux freins. Le devant de l’auto a reculé jusqu’au cockpit. La série American Canadian Tour (ACT) venait faire son tour également. Un peu comme le championnat LMS, la série faisait des arrêts à Ste-Croix et Saint-Félicien. Quand on voyait les voitures entrer sur la piste, à Saint-Félicien, un dimanche après-midi, sans «bumper» avant, du duck tape plein la carrosserie, c’était signe que ça avait brassé pas mal la veille. De leur côté, j’ai déjà vu tout près de 35 voitures, si ce n’est pas plus! Imaginez ça sur le tri-ovale! Pour être honnête avec vous, j’aime bien ça de temps en temps quand ça brasse. Ça ajoute le petit quelque chose qui manque des fois à une course plate et sans intérêt. Randy McDonald, un pilote canadien originaire d’Oshawa en Ontario, a déjà gagné une course après avoir accusé deux tours de retard. C’était de toute beauté de le regarder aller dans le trafic. Ça a donné un méchant beau spectacle. 

         C’est certain qu’il n’y a pas eu juste de bons souvenirs. Il y en a eu des moins bons. Mon père a eu quelques accidents au fil du temps. Un assez sérieux qui a nécessité un bref passage à l’hôpital. Je me suis réveillé pendant la nuit après l’accident et mon père était bien présent dans notre chambre. À Sainte-Croix, de ce que je me rappelle, un des pilotes a fait un tête-à-queue sous la tour du «flagman» devant les estrades. Mon père s’en venait à bonne vitesse dans le virage 4. Pendant qu’il finissait son tête-à-queue, mon père pensait avoir l’espace tout près du mur pour passer. Hélas non! L’espace s’est très vite refermé. L’impact a été tellement violent que l’annonceur a été obligé de mentionner au micro de ne pas approcher près de l’accident avec une cigarette car il y avait beaucoup d’essence partout à terre. (c’est l’accident de mon père sur la photo) J’ai braillé comme un bébé tellement j’ai eu peur de le perdre cette soirée-là. Faut croire que l’on avait notre bonne étoile au-dessus de nos têtes. Beaucoup de peur pour moi, pour nous! Beaucoup de mal pour mon père, mais on a pu passer la journée avec lui le lendemain et c’est ce qui était le plus important. Les courses devenaient tout à coup très secondaires.

         En février dernier, je suis allé rejoindre mon père en Floride pour y passer mes vacances. J’ai été voir des courses pendant 5 jours consécutifs. On est allés deux soirs à New Smyrna Speedway. Ça m’a tellement rappelé de bons souvenirs. Même chose du côté de la terre battue, à Volusia. Le fait de se remémorer autant de souvenirs, qu’ils soient bons ou moins bons, ça n’a pas de prix. Ça part du son des moteurs qui rugissent à l’odeur du méthanol en passant par le traditionnel «Drivers, start your engines». Tout me ramène en arrière! A chaque fois que je vous côtoie les week-ends, que j’entends un «bang» parce que ça joué du coude dans la courbe numéro 1, c’est juste un «feeling» incroyable. Je suis juste content d’être là et j’apprécie chaque moment comme si c’était le dernier.

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