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L’histoire du Grand Prix des États-Unis

Chroniques Mathieu Brière
L’histoire du Grand Prix des États-Unis La course automobile aux États-Unis a pris son essor au tournant du 20e siècle, notamment lors de la construction du Indianapolis Motor Speedway, alors pavé à 100% de briques. Après quelques années à tenir le Grand Prize Trophy, sur des circuits de ville un peu partout au pays, l’épreuve des 500 milles d’Indianapolis y est devenue la Reine des événements majeurs. Dès 1950, la course normalement tenue en mai a fait partie du nouveau Championnat du Monde de Grand Prix, avec règles mixtes entre USAC (United States Auto Club) et le Championnat du Monde. Les pilotes américains ont remporté les victoires jusqu’en 1958, avant de voir un nouvel événement naître l’année suivante : le Grand Prix des États-Unis. En 1959, la course a été présentée, pour la seule fois, sur le tracé aéroportuaire de Sebring en Floride. Le Néo-Zélandais Bruce McLaren y a remporté sa première victoire en carrière, après que son coéquipier chez Cooper, Jack Brabham soit tombé en panne sèche au dernier tour. Cela lui a permis d’être le plus jeune vainqueur de l’histoire de la F1 (excluant le Indy 500) pendant près de 44 ans, jusqu’à ce que Fernando Alonso ne le batte que par quelques mois en 2003 avec la victoire en Hongrie (voir autre texte). D’est en ouest, le cirque de la Formule Un s’est déplacé en Californie sur le circuit permanent de Riverside, pour une seule fois également. Stirling Moss a gagné l’épreuve en partant de la pole position, une rare victoire d’une entrée privée. À partir de 1961, un retour dans l’est s’est fait, plus au nord dans l’état de New York, dans la région éloignée de Watkins Glen. Un tracé court, de forme oblongue, avec des courbes très rapides et une ligne de départ située tout près des premiers virages, une série de trois longues courbes en alternance. Tenues par une température souvent imprévisible et en grand contraste d’une année à l’autre, les huit premières courses ont été remportées par des pilotes britanniques. Jim Clark et Graham Hill s’y sont imposés chacun à trois reprises. Innes Ireland en 1961 et Jackie Stewart en 1968 complètent le portrait. Une nouvelle section a été ajoutée après le grand virage au bout du droit arrière en 1971. La fin du tour a aussi été remodelée, et la ligne de départ a été déplacée sur une nouvelle ligne droite perpendiculaire à celle où elle était jadis située. Le Français François Cevert, éternel second de Jackie Stewart, a remporté sa seule et unique victoire en carrière en ce 3 octobre anormalement chaud. Les réjouissances ont été de courte durée puisqu’il a trouvé la mort deux ans plus tard dans un violent accident au milieu des S après le premier virage. Son coéquipier, qui avait déjà annoncé sa retraite, a alors décidé de se retirer de ce qui aurait été son 100e et dernier départ. Le malheur a continué de s’acharner autour du circuit de Watkins Glen en 1974, alors que la Surtees de l’Autrichien Helmuth Koiniig est passée sous un rail de sécurité, voyant le jeune de 25 ans littéralement décapité. Une chicane a alors été instaurée dès l’année suivante entre le premier et le deuxième point de corde dans les S afin de ralentir les voitures de façon générale. Notons aussi les victoires de Niki Lauda et James Hunt dans leurs années de championnat en 1975 et 1976, ainsi que celle de Gilles Villeneuve en 1979 sous une pluie diluvienne. De 1976 à 1980, le Grand Prix tenu à Watkins Glen était nommé le Grand Prix des États-Unis Est puisqu’une course se tenait en parallèle, en début de saison cependant, à Long Beach en Californie, soit le Grand prix des États-Unis Ouest. Situé en bord de mer, le nouveau circuit urbain en forme d’ancre de bateau avait comme principale caractéristique ses deux virages en épingle reliés par une longue section rapide toute en courbe sur la Shoreline Drive. La ligne de départ située tout en haut (littéralement) du circuit le long de la Seaside Way, avec la série de virages en montée pour y arriver ainsi que les 90 degrés en descente une fois arrivé au bout. Des chicanes ont été mises sur le tracé en 1982 et 1983, les deux dernières éditions tenues et l’épingle située à la fin de la Shoreline Drive ainsi que l’enchaînement autour de l’avenue Pine ont été remplacés par une série de virages à angle droit pour retourner au haut du circuit. Il est à noter que lors des huit Grands Prix tenus à Long Beach, huit pilotes différents se sont imposés, dont Gilles Villeneuve en 1979. En 1981, après le départ de Watkins Glen du calendrier, les autorités de la F1 ont décidé d’aller faire un tour au Nevada, dans la ville qui ne dort jamais, Las Vegas. Un circuit très peu inspirant, court, tortueux et plat, situé dans le stationnement du Caesar’s Palace, un des plus fameux hôtels du monde. Les pilotes l’ont sans cesse défini comme étant le pire circuit de l’histoire du sport. Alan Jones et Michele Alboreto y ont néanmoins inscrit respectivement leur dernière et première victoires en carrière. L’année suivante, une nouvelle piste temporaire dans les rues de Detroit fait son apparition au calendrier. Tracé plutôt lent, sans réelles caractéristiques distinctives, à l’exception du très long premier virage et du court tunnel vers la fin du tour, il est rapidement devenu aussi peu populaire auprès des pilotes que Las Vegas. En raison de la piste très bosselée et poussiéreuse, en plus du nombre élevé de changements de vitesse à chaque tour, le taux de voitures à l’arrivée n’a jamais été au-dessus de 50% lors des sept courses disputées au Michigan. En 1983, Michele Alboreto a remporté ce qui allait devenir la dernière victoire de l’emblématique moteur V8 Ford Cosworth DFV, introduit en 1967. Le grand Brésilien Ayrton Senna s’est imposé lors des trois dernières éditions, de 1986 à 1988. Entretemps, une tentative plutôt manquée a été faite à Dallas en 1984. La piste, tracée autour du Fair Park, était relativement lente et étroite. Les températures en juillet étant excessivement chaudes dans cette région du sud des États-Unis, la course a été devancée de 3 heures à 11 heures du matin, pour accommoder les pilotes. Ces derniers pouvaient ressentir jusqu’à 60 degrés centigrade dans leur cockpit. Habitué au froid de sa Finlande natale, et surtout équipé d’un système de refroidissement corporel efficace, Keke Rosberg a donc remporté la seule épreuve tenue à Dallas. Mais l’image la plus iconique de cette course est celle où le meneur des 35 premiers tours, Nigel Mansell a tenté de pousser sa Lotus Renault jusqu’au fil d’arrivée, en panne dans le dernier virage. Il s’est alors effondré, sous l’effet de la chaleur, mais il s’est néanmoins classé sixième, à trois tours de Rosberg. Crédit photo : Rainier Schlegelmich Après la dernière épreuve de Detroit, la Formule Un s’est déplacée au sud, en Arizona cette fois-ci. Les rues de Phoenix ont tenu les trois dernières éditions du Grand Prix des États-Unis avant longtemps sur un tracé de 3,8 kilomètres. Constitué majoritairement de virages à angle droit, ce circuit-ci était aussi impopulaire que ses prédécesseurs. Lors de la course de 1989, le pilote de la place, Eddie Cheever Jr. a inscrit son tout dernier podium en carrière. Le point culminant des courses à Phoenix a certainement été l’éclosion du jeune Français Jean Alesi dans sa Tyrrell à moteur Ford en 1990. Crédit photo : LAT Images Il a su profiter de la qualité de ses pneus Pirelli de qualifications pour se classer en quatrième place sur la grille. Il est à noter que la Minardi Ford de Pierluigi Martini se trouvait deuxième au départ! Alesi s’est alors faufilé en tête peu de temps après l’extinction des rouges et il a conservé sa position jusqu’au 34e tour, lorsque Senna a essayé de le dépasser, mais le Français s’est vite remis devant la McLaren. Au tour suivant, le grand Ayrton a dépassé la Tyrrell pour de bon. Il s’agissait du premier podium pour Jean Alesi. Le circuit a été révisé pour 1991, plus rapide, et avec moins de 90 degrés. Mais la course a été relativement sans histoire. Dans l’après-saison suivant, la FISA a annulé le reste du contrat de 5 ans. La F1 n’est pas revenue en sol américain pour les huit années suivantes. Un retour attendu s’est fait à Indianapolis, sur un nouveau circuit routier qui passe par l’intérieur du circuit ovale de 2,5 milles. Après la section sinueuse, un long retour sur l’ovale permettait aux voitures d’être à fond sur plus de 20 secondes. Il fallait donc choisir le compromis idéal entre la section rapide et les virages lents. Le réglage de qualifications privilégiait donc les virages au détriment de la vitesse de pointe, qui a rarement dépassé les 320 km/h lors de la séance officielle. Au fil du temps, la qualité des pneus a ramené le focus du côté de la vitesse pure, comme le démontre la saison 2003 avec ses maximums atteints en qualifs de presque 355 km/h par les deux Williams et leur monstrueux moteur BMW. Revenons en 2000 donc, le double champion en titre Mika Häkkinen a perdu une sérieuse option à la défense de son titre en raison d’un bris de moteur en course. Michael Schumacher a remporté cinq courses tenues sur le rovale, n’étant privé de victoire qu’en 2001, alors que Häkkinen remportait sa dernière victoire et en 2002, par la plus infime marge de l’histoire de la F1, soit 11 millièmes de seconde. Lewis Hamilton a gagné la dernière épreuve tenue à Indianapolis. La saison 2005 a été marquée par le scandale des pneus Michelin qui éclataient sur le virage relevé. Jarno Trulli a inscrit malgré tout la pole position pour Toyota, mais le lendemain toutes les voitures équipées de Michelin ont pris la route des puits à la fin du tour de formation, ne laissant que six voitures pour compléter les 73 tours prévus, soir les Ferrari, Jordan et Minardi. Crédit photo : Getty Images Les spectateurs en furie ont laissé savoir leur mécontentement en huant et en lançant des objets vers la piste, notamment des canettes de bière. Schumacher a donc gagné, suivi de son coéquipier Barrichello et du Portugais Tiago Monteiro. Il s’agissait, sans surprise, du seul podium de sa courte carrière. Après la saison 2007, il ne faisait plus de sens, financièrement parlant, pour Tony George, de tenir une course de F1 sur son circuit. Il n’y a donc pas eu de Grand Prix aux États-Unis pendant quatre ans. Un retour de la discipline au Texas allait donc arriver en 2012, sur un tout nouveau circuit dessiné par Hermann Tilke situé dans la capitale de l’État, à Austin. Le Circuit des Amériques, d’une longueur de 5,5 kilomètres, a un virage signature en son épingle au sommet de la ligne de départ-arrivée, avec une pente de 11%. Des S qui rappellent l’enchaînement Maggotts-Becketts-Chapel de Silverstone suivent la descente qui inclut un virage à droite qui se passe à fond. Une autre épingle suit les S, avec une ligne droite de 1 km par la suite. Une série de virages lents mène vers un grand arc qui rappelle le virage 8 d’Istanbul, mais pris dans le sens contraire. Les deux derniers virages à gauche ferment la marche de ce circuit lévogyre. À quelques accrochages près, la plupart des courses ont été dénuées d’événements marquants, ce qui n’est pas surprenant considérant la nature du circuit. Incluant sa dernière victoire pour McLaren, Lewis Hamilton a remporté toutes les épreuves tenues à Austin, sauf une. C’est son adversaire d’aujourd’hui Sebastian Vettel qui s’est imposé en 2013 sur sa Red Bull. Donc, voilà, un Grand Prix aussi ancien, ayant eu autant de circuits différents ne pouvait qu’être aussi rempli d’histoire. En espérant que le Circuit des Amériques nous en donne pour plusieurs années et que ces prochaines courses soient excitantes. Si vous voulez parler d’un événement non mentionné dans le texte, n’hésitez pas à en faire mention en commentaires ci-dessous.
Mathieu Brière
Chroniqueur
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