Crédit photo :Yvan Poitras

Du crampon "made in Québec"

Chroniques Joel Brulé
Tim Tremblay, Eve Brodeur, Dave "crazy" Blanchet tous made in Québec C’est sous un soleil de plomb que j’ai finalement accepté l’invitation d’assister à une épreuve de motocross "made in Québec". Une manche du championnat provincial à Ste-Julie m’avait-on dit. En toute vérité, mes attentes étaient bien peu élevées et c’est avec peu d’enthousiasme que je pris l’autoroute 20 menant en quelque part au beau milieu de nul part... Dès mon arrivée sur le site, POW! On se croirait dans un clone de Woodstock en Beauce! Les "Winnebago", les roulottes, les tentes couvrent le gigantesque site de leurs couleurs rayonnantes. L’ambiance est festive et la camaraderie est palpable. Le préposé au "parking" m’accueille avec un bras dans le plâtre, du poignet jusqu’ à l’épaule. Je m’informe sur sa blessure: "Hey, qu’est-ce qui t’es arrivé?" Il me répond tout bonnement: "V’la deux semaines, j’ai manqué mon coup en voulant faire un double, j’ai pris une calvince de fouille! Faque vu que je ne peux pas courser, je fais le "parking."! Je passe finalement l’entrée et je commence à déambuler à travers le paddock improvisé et surpeuplé de passionnés de motocross. Les banderoles couleurs pastel et les fanions survolent le site avec harmonie. Je me sentais privilégié de faire partie du groupe! Lentement je commence à prendre des informations sur le déroulement et le fonctionnement de toute cette fanfare de bruits tonitruants. Difficile de s’y retrouver quand il y a 371 inscrits au programme! Hommes, femmes, vétérans, 50cc, pro, inter... 2 temps, 4 temps... 450cc, 250cc...WOWWW!  Je croise un bon samaritain qui, à force de patience, me donne les renseignements de base. Il me présente les équipes de pointe, les différentes motos, et quelques pilotes tous habités d’un enthousiasme débordant. Des hommes, des femmes, des enfants, des vétérans, tous vêtus comme des chevaliers, leur visage couvert de "bouette", ils me serrent la main avec fierté. Heureux qu’enfin un chroniqueur prenne un peu de temps pour eux, pour leur sport. Les rencontres et les discussions vont bon train et, à un certain moment, malaise chez mon collègue du moment. D’un seul coup, je sens que sa zone de confort n’est plus la même. Je lui demande: "Que se passe-t-il Yvan?" Sa réponse ne tarde pas: "Check le gars en face, c’est TIM TREMBLAY!" Excuse mon ignorance Yvan, mais c’est qui ça Tim Tremblay? Tu ne connais pas Tim Tremblay??? Euhhhhh Non? Batince, tu sors d’où??? Je prends donc un moment pour me documenter via mon cellulaire. Je tape donc TIM TREMBLAY sur Google juste pour voir. OH MY GOD! Je suis en présence d’un champion du monde de snowcross moi là! Je fais ni un ni deux et je demande timidement à le rencontrer pour une entrevue pour le compte de 360nitro.tv. C’est avec beaucoup de gentillesse et de courtoisie qu’il accepta mon invitation à condition que je le laisse seul quelques minutes pour casser la croûte en famille. C’est finalement assis sur une chaise de terrasse qu'aura lieu mon premier contact avec Tim Tremblay. Accompagné de sa conjointe Cindy (policière à la Sureté du Qc) et de ses deux filles (Tifany 3 ans et Tara 4 ans),  je déboule mes questions. Très calme, d’une politesse désarmante, Tim me répond avec aplomb et précision. Il me fait comprendre qu’il fait du motocross l’été pour garder la forme car son véritable métier, c’est le snowcross. Originaire de Ste-Jeanne-d’Arc au Lac St-Jean (près de Dolbeau), Tremblay gagne sa vie au rythme des moteurs, c’est son métier, pilote! Il s’avance en m’annonçant que son contrat avec BRP usine est sur le point d’être renouvelé et que son plus féroce rival (Tucker Hibert) ne sera pas de la partie pour 2018. Après cinq minutes d’interview, je comprends rapidement pourquoi Tremblay se couvre de succès. Pas une once de graisse sur le corps, une tête programmée pour la vitesse et des nerfs à faire plier le pont Victoria! Il me raconte qu’il passe l’hiver en compétition majoritairement aux USA. Qu’il passe son temps entre deux avions pour pouvoir faire ses métiers de pilote et de papa. Que sa vie est un feu roulant de temps contre la montre. Impossible pour moi de ne pas être impressionné. Quel phénomène! Et pourtant, c’est en toute simplicité que notre conversation prendra fin. C’est sous une salutation familiale que je quittai la petite remorque des Tremblay, heureux d’avoir partagé un trop court moment avec ce grand champion bien de chez-nous, made in Québec! Encore un peu secoué de mon interview avec Tim, mon hôte improvisé m annonce que la championne canadienne est aussi en compétition ce jour-là! Je lui demande: "Elle est où?" Yvan me répond: "Suis-moi, je vais te la présenter." Après quelques minutes de marche, me voilà devant ÈVE BRODEUR en personne. Batince! Femme charismatique, elle accepte de m’accorder quelques minutes. Son père Sylvain se joint à nous et c’est avec grand plaisir que mes questions déferlent sur les Brodeur. Elle a 18 ans, étudiante au CÉGEP en sciences, elle projette de faire sa médecine. Ève se couvre de gloire partout où elle passe, le genre de Sidney Crosby du motocross féminin. En fait, il y a Ève et... les autres! Trois fois championne canadienne, Miss Brodeur est dans une classe à part. L’orgueil de Laval s’est même déjà offert un podium à la plus prestigieuse des épreuves au monde! C’est sous un regard pétillant de fierté que Sylvain assiste à notre dialogue. Homme fier et dévoué, je prends un moment pour le questionner à son tour. Il m’annonce qu’il vient de faire l’aller-retour Laval-Pittsburgh au volant de son motorisé pour permettre à Ève de participer à une épreuve du côté américain. La fusion entre Mr. Brodeur et moi-même est facile et naturelle, je prends sur moi de lui demander combien coûte une saison de motocross? Il m’annonce que 60 000 $ sont nécessaires, mais qu’avec les commandites, son portefeuille se soulage de 20 000 $. Heinnnn??? Ève s’entraîne 12 mois par année et l’hiver, c’est en Floride qu'elle fait hurler le moteur de son "cross". Sylvain accompagne sa championne et la guide à travers un mode de vie exemplaire. À ne pas en douter, pour les petites nouvelles, c’est à Ève Brodeur qu'on veut ressembler. Chaque compétition motorisée comporte SA personnalité hors-norme. Il y a toujours un pilote qui ressort du lot avec un style qui fait vibrer la galerie. Il y en a toujours un qui " y va pour le show!". Le motocross ne fait pas exception. Reconnu pour défier la mort à chaque présence sur un circuit, Dave "crazy" Blanchet gravite dans un monde que lui seul en connaît le secret. Le genre de gars qui donne parfois l’impression d’être pas tout à fait normal! Il saute plus haut, plus loin et sa moto prend des angles qui défient souvent les lois de la gravité. Véritable prodige des aréna-cross, "CRAZY" Blanchet démolit les circuits en roulant à tombeau ouvert habité d’un sens du spectacle hors du commun. Toujours à demi sérieux, ce foreur résident de St-Apollinaire m’annonce avec fierté que le saut le plus risqué du circuit de Deschambault fut rebaptisé en son nom. Il fut le premier à maîtriser ce saut considéré comme le saut de la mort! Toujours accompagné de sa copine Bianca Branchaud (aussi pilote de motocross féminin) ainsi que son chien Samy, "crazy Blanchet parcourt les "tracks" du Québec sans se soucier du lendemain. C’est avec un éclat brûlant d’impatience qu’il m’annonce faire partie des inscrits lors de la compétition prévue au stade Olympique! Sacré Dave, il vaudra probablement le prix d’entrée à lui seul! À la fin de l’entrevue, d’un air sérieux et reconnaissant, c’est en regardant au sol qu'il me demanda: " Peux-tu remercier mon équipe s’il-te-plaît?". Même en entrevue, Dave saura encore s’oublier au profit des autres! Respect man! Je croyais bien avoir terminé ma journée dans ce monde qui m’était totalement inconnu. En quelques heures seulement, j’avais interviewé un champion, une championne et "Mr.  Excitement" en personne. Je me disais que c’était fort suffisant. Mais voilà qu’une scène capte mon attention. Une jeune fille nommée Malia Garant faisant à peine 4 pieds 9 pouces enfourche sa bécane maintenue tant bien que mal par sa mère pleinement dévouée. Un coup de "crank", la poignée des gaz bien tordue, elle lâche l’embrayage et part en coup de vent laissant derrière elle, un nuage de poussière considérable et quelques amateurs complètement médusés. Déjà considérée comme la dauphine d’Ève Brodeur, Malia ne laisse personne indifférent. Du haut de ses 13 ans, elle dégage déjà ce petit regard empreint de confiance. C’est sans aucune forme d’orgueil que j’admets avoir, moi aussi, été conquis par la tornade de Lévis! C’est la tête en broussaille que se termina ma première expérience dans ce monde complètement fou. À ma sortie du site, je pris un instant pour regarder une dernière fois ce site qui m’avait procuré autant d’émotions. Je balayai du regard tous ces sourires, ces accolades, ces chutes, ces victoires et au beau milieu du décor, j’ai bien cru apercevoir mon gars du "parking", le bras toujours en bandoulière, en train de changer les sacs dans les poubelles. Rien ne les arrête... Crédits photos : Yvan Poitras
Joel Brulé
Chroniqueur
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