Je n’avais rien de prévu pour mes impressions de conduite la semaine dernière. J’ai donc confié à M. Steve Spence, directeur des prêts de plusieurs constructeurs automobile au Québec, le soin de me trouver un véhicule intéressant. À ma grande surprise, il m’avait réservé une berline Lincoln MKZ AWD toute neuve à moteur V6 pour cette première semaine de 2018.
Ceux qui suivent ce blogue savent que j’ai déjà bien couvert ce modèle depuis son lancement. Toutefois, je n’avais jamais conduit la voiture en hiver et encore moins dans un environnement aussi hostile (lire «froid glacial») que celui que nous venons de connaître. Ajoutez à cela une bonne chute de neige qui allait rendre nos routes moins faciles.
Mais avant de vous parler de la MKZ, laissez-moi vous dresser un rapide portrait de la marque. Selon un de mes amis est d’origine chinoise qui a vu et admiré ma MKZ d’essai, la marque Lincoln est très respectée dans son pays d’origine. Coïncidence, je lisais, durant la même période, un article dans la publication spécialisée Automotive News qui expliquait comment la marque a refait surface après une importante baisse de popularité (moins de 100 000 ventes par année) il y a quelques années.
On y expliquait alors que Kumar Galhotra, celui qui fut directeur de la Lincoln Motor Company jusqu’à tout récemment (si j’ai bien compris, il l’est toujours en attendant un remplaçant) et qui est président du marketing de Ford aujourd’hui, est le grand responsable du renouveau de Lincoln. Il s’était donné comme but de vendre quelques 300 000 unités de la marque dans le monde, un but qui sera bientôt atteint…grâce aux ventes en Chine ! (Les ventes en seraient rendues à plus de 175 000 unités). Mais c’est à se demander comment les consommateurs nord-américains ont sont venus à bouder les deux marques de luxe américaines, Cadillac et Lincoln pour les remplacer par des marques étrangères dont Mercedes-Benz, Lexus, Audi et autres. Quand j’étais jeune, outre Rolls-Royce, les autos de luxe en Amérique du Nord s’appelaient surtout Cadillac et Lincoln!
La Lincoln MKZ 2018, telle que j’en ai pris la livraison. Son avant n’est certes pas sans nous rappeler celui de la Continental. (Photo Éric Descarries)
De l’arrière, cependant, on reconnaît le coffre de la MKZ. (Photo Éric Descarries)
Chez Lincoln, on essaie de faire renaître cet engouement pour les luxueuses américaines. Et tout dernièrement, les dirigeants de la marque ont décidé d’abandonner graduellement les lettres MK pour revenir à de véritables «noms». L’exercice a débuté avec la toute récente Continental (un nom «historique» pour Lincoln) qui a remplacé la MKS. Puis, tout dernièrement, Lincoln décidait de changer le nom de son populaire VUM MKX (redessiné) pour celui de Nautilus. Que fera Lincoln avec le MKC (qui, selon les photos espion aurait été révisé lui aussi) et surtout avec la MKZ ? Souvenez-vous qu’au départ, la MKZ s’appelait Zephyr, le nom que Lincoln avait donné à son modèle populaire à la fin des années trente pour le faire disparaître en 1949 avec un redesign complet de voitures de la marque.
Plus tard, Ford utilisera le nom Zephyr (le nom d’un vent) sur de petites Mercury intermédiaires (une marque maintenant disparue) après l’avoir utilisé en Grande Bretagne sur une de ses plus grandes Ford anglaises. Le nom Zephyr a-t-il été trop «galvaudé» pour être repris? (Notez que Ford ravivera les noms de Ranger et de Bronco sous peu…à quand le retour des Thunderbird, Galaxie, Falcon, Ranchero et ainsi de suite?).
Enfin, je me demande si, un jour, Ford du Canada pourra réagir à la nouvelle politique de vente des Lincoln aux États-Unis? On sait qu’il y a quelques années, la faction canadienne du grand constructeur américain décidait de combiner Lincoln aux concessions Ford (Mercury étant maintenant disparue). Aux États-Unis, le consommateur intéressé par Lincoln est reçu dans un établissement individuel selon une approche unique et surtout très personnelle appelé Black Label. Ce type d’approche serait très difficile, semble-t-il, à instaurer chez nous. Une population plus petite y serait certes pour quelque chose.
Ce qui me ramène à la MKZ (qui sait? Elle s’appelera peut-Zephyr sous peu…). Parue l’année dernière avec ce nouvel avant très semblable à celui de la Continental (que l’on retrouvera aussi sur le grand Navigator, le MKX…pardon, Nautilus et bientôt le MKC), la berline intermédiaire MKZ est disponible avec un moteur à quatre cylindres turbo ou avec un ensemble hybride électrique. Elle est aussi livrable avec ce puissant V6 biturbo 3,0 litres GTDI (on n’utilise pas le nom EcoBoost chez Lincoln) et la traction intégrale (la traction avant étant de base), comme celle qui m’a été confiée.
Ce V6 fait rien de moins que 400 chevaux (350 avec la traction avant) et 400 li-pi de couple. Il s’agit ici d’un moulin très puissant capable de projeter cette imposante voiture à 100 km/h en moins de six secondes malgré le fait qu’il ne soit combiné à une boîte automatique qu’à six rapports (la plupart de ses concurrentes ont au moins sept rapports). Mais lors de mon essai hivernal, la haute performance n’était pas ce que je recherchais le plus.
Ce moteur V6 de 3,0 litres de Ford n’est disponible que dans les Lincoln. Il n’est même pas baptisé EcoBoost malgré sa grande ressemblance à ce type de moteur. (Photo Éric Descarries)
Malgré le fait que j’aurais (personnellement) plutôt pensé à ranger cette belle voiture pour l’hiver, je me demandais comment elle se débrouille durant la saison froide. Et parlant de saison froide, je fus bien servi, merci! Il a fait froid, très froid. Et il a neigé, beaucoup neigé!
Encore une fois, il est toujours un peu dommage de monter à bord d’une voiture de ce calibre (et de ce prix) avec de grosses bottes d’hiver pleines de neige et de gadoue. L’intérieur de cette auto est superbement aménagé. Le tableau de bord affiche un style unique (qui n’est pas toujours apprécié par tous les amateurs d’automobiles) avec une foule de commandes électroniques dédoublées par des commandes manuelles quand même manipulables avec des gants. Je connais quelques personnes qui ont possédé des MKZ au cours des dernières années et le seul ou le plus important reproche qu’ils ont eu à faire à leur Lincoln concernait cette console centrale électronique qui a dû être reprogrammée par les concessionnaires de la marque. Mais tout semble être rentré dans l’ordre par la suite.
Les sièges avant de la MKZ sont ajustables à plusieurs niveaux. (Photo Éric Descarries)
Créée pour le froid, la MKZ? Oui, avec des sièges avant et arrière chauffants (ceux d’avant sont ajustables de multiples façons via des diagrammes à l’écran central), un volant chauffant en plus d’un chauffage qu’il me fallait baisser après un certain moment, même si le mercure extérieur oscillait autour des moins 20 degrés Celsius et plus froid encore.
Malgré plusieurs retouches apportées au tableau de bord, surtout au niveau des commandes du centre, il y en a qui portent des remarques négatives à son apparence. (Photo Éric Descarries)
Les passagers d’arrière ont même droit aux coussins chauffants. (Photo Éric Descarries)
Malgré des charnières qui pénètrent profondément dans le coffre, les objets qu’on y transporte en sont protégés. (Photo Éric Descarries)
Question mécanique, le V6 n’a jamais hésité au démarrage (il faut dire qu’avec l’injection électronique, il y a désormais moins de problèmes de ce côté sur presque tous les véhicules récents quoique ce fusse toujours possible). Pour passer en vitesse, il ne suffit que d’appuyer sur les boutons PRNDL (n’essayez pas de comparer ce système à celui des problématiques Edsel de…1958 dont in changeait le rapport avec des boutons au centre du volant!).
Tout a fonctionné sans problème. Une fois en vitesse, on apprécie facilement la traction intégrale sur la neige mais Ford du Canada avait vu à équiper l’auto de pneus d’hiver Michelin très efficaces. Notez, toutefois, que ces pneus de performances sont de taille très basse ce qui a causé des problèmes à certains propriétaires de MKZ l’année dernière, surtout dans la région de Montréal où les nids-de-poule cassent littéralement la carcasse des flancs des pneus.
Malgré leur imposante largeur, ces pneus d’hiver Michelin se sont avérés très efficaces dans la neige, la traction intégrale de la MKZ aidant! (Photo Éric Descarries)
Malgré la neige et les routes froides et glacées, j’ai pu profiter des performances de la MKZ dont les accélérations et les reprises sont impressionnantes. Mais, sans vouloir exploiter cette puissance, spécifions immédiatement que c’est la traction intégrale qui est la caractéristique la plus importante de cette auto en hiver. Malgré qu’au départ, la MKZ soit une voiture à traction avant, sur la neige, en accélérant dans les virages, la puissance m’a parue plus biaisée au pont arrière me permettant quelques petits dérapages (contrôlés).
C’est ici que les pneus Michelin se sont avérés efficaces. L’antipatinage demeure utile mais il ne m’a pas empêché d’utiliser certaines capacités de la MKZ. Notons que le moteur V6 de performance est plus bruyant que les autres moteurs de ce véhicule. Mais les études ont prouvé que les amateurs de voitures de performance aiment bien entendre (au moins un peu) le son du moteur à l’effort.
Évidemment, la consommation a beaucoup souffert du temps glacial et des routes enneigées. Je n’ai obtenu qu’une moyenne de 16,4 L/100 km (alors que l’ordinateur de bord marquait 15,4). C’est non seulement le prix à paye pour vivre au Qébec mais aussi pour pouvoir profiter d’une auto aussi puissante!
Le prix de base de la Lincoln MKZ Reserve AWD est de 47 950 $. L’ajout du moteur de performance de 3,0 litres a fait gonfler la facture de 4500 $, le toit panoramique de 2000 $, l’ensemble de technologie de 2450 $, l’ensemble de luxe (phare DEL adaptatifs, chaîne audio Revel) de 5500 $, l’ensemble d’aide à la conduite (roues d’aluminium de 19 pouces, pneus de performance 245/40R19, sièges multicontour et volant chauffant) de 3400 $ et des carpettes de caoutchouc de 250 $. Au total, on verra 18 900 $ d’options sur cette Lincoln. Ajoutons-y les 2000 $ de frais de livraison et de préparation et on en arrive à un prix final de 68 850 $ !
Un peu biaisé cet article? Peut-être, vu que j’aime bien la marque Lincoln. Je suis heureux que Ford ne l’ai pas abandonnée (une option qui avait été envisagée) et même que le constructeur ne l’ait pas laissée comme proie aux utilisateurs commerciaux (comme l’ancienne Town Car). Si le travail de Galhotra se poursuit avec succès, si les modèles présentés réussissent à charmer les consommateurs de voitures de luxe, si l’amélioration de la finition continue de progresser, la marque Lincoln retrouvera peut-être sa gloire d’antan. Mais la concurrence veille au grain et la route sera longue et difficile!
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